Tuesday, July 03, 2007

Moment critique #0 [Glass, Guillaumin, Portoghesi, Castex, Colvin, Passeri]

Avez-vous écouté la BO de Chronique d’un scandale (Notes on a scandal), film réalisé par Richard Eyre et qui réunit à l’écran Judi Dench et Cate Blanchett ?... Voilà un moment que je ne vous avais pas parlé de Philip Glass !...

Je vais à ce sujet devoir parler par références : cette BO (nominée aux Oscars 2007) naît d’une inspiration proche de celle de The secret agent (1997, Christopher Hampton) ou, à moindre égard, de Dracula (BO écrite en 1999 pour le film réalisé en 1931 par Tod Browning) ; l’orchestration cependant est largement similaire à celle de The secret agent (grosse formation à cordes, tandis que Dracula se contente, pour ce que j’appellerai improprement le ‘continuo’, d’un quatuor) tous comme certains leitmotivs attribués, selon les oeuvres, au triangle, à la harpe, au xylophone, au violon (pizzicato). Cela rappellera également cette habitude qu’à Glass d’attribuer certains thèmes à un ou deux instruments (comme le piano pour Dracula, le violoncelle pour The secret agent). L’esprit de certaines mesures, et la structure, font davantage penser à la BO de Roving Mars (la grosse machine imax produite par Disney et réalisée par George Butler en 2006), et on retrouve parfois certains accords tonitruants comme dans la BO de Undertow (film de David Gordon Green, 2004, notablement produit par Terence Malik), mais pas, non plus, la grandiloquence de la BO de The Hours (Stephen Daldry, 2002 (BO nominée aux Oscars 2003)).

Point d’effets vocaux cependant comme dans les BO de Undertow ou Kundun (Martin Scorsese, 1997), ni d’utilisation d’instruments inhabituels (didgeridoo (Undertow), doungtchen (longue trompe tibétaine) et gyaling (hautbois) (Kundun)), ni d’intrusions ou extraits du film lui-même comme dans la BO de The thin Blue Line (Errol Morris, 1988) ; pas d’emprunts, non plus, à d’autres oeuvres (comme pour The Hours, Mishima (Paul Schrader, 1985) ou The thin Bue Line) : la BO de Notes on a scandal est unique et à usage linéaire unique, comme celle de The Illusionist (Neil Burger, 2006) ou celle de The secret agent. L’argument majeur de cette BO (qui vaut pour The Secret Agent, Dracula, The Illusionist, Roving Mars et Undertow) est constitutif de son seul défaut : presque tout se tient d’un seul corps, aucune ‘piste’ ne peut être isolée à peine de perdre son intérêt, celui d’être entre deux autres et de proposer une ligne mélodique quasi continue.

[On est donc loin d’autres BO dont on peut écouter isolément certaines parties, comme The Hours, puisque composée, comme je le disais à l’instant, sur des partitions antérieures (Metamorphosis 2 (rebaptisée "Escape !" pour la BO) et Island, un ‘Glasswork’ (rebaptisé "Tearing Herselg Away" dans la BO)) et à ce titre, envisagée comme la traduction, distincte, quoique toujours cohérente, d’éléments factuels et perceptifs différents mais éventuellement conjoints (c’est tout l’art de garder un leitmotiv et de l’accommoder de différentes lignes mélodiques).]

A ce titre, peut-être pourrait-on reprocher à Glass, pour la BO de Notes..., de tirer à la ligne au détour d’une fin de partition et, parfois, de se contenter de joindre deux "éléments" en se répétant un peu – avec un certain soin de l’ornementation, mais au point qu’on le remarque (sans que cela soit non plus désagréable). Cependant l’harmonie est fluide, évidente, et même sans connaître les images qui vont dessus, on peut tout à fait supposer la teneur des scènes : c’est donc, à ce titre, une BO réussie, puisqu’elle exprime soit un état de conscience, soit une action en cours, alternant modes mineur et majeur, tonalités fortes et douces, sourdes ou incisives.

Ne lisez pas Angoulême, la ville belvédère, de Nathalie Guillaumin. Les photos de Michel Garnier sont jolies, mais l’auteur prend son lecteur pour un con. Elle écrit sur un mode mi-bétifiant mi-halluciné, ne s’épargnant aucun effet de style, aucun cliché. On apprend ainsi que « L’Angoumois est une verte contrée », puisque « la douceur océanique règne sans excès de pluie mais avec juste ce qu’il faut pour arroser les terres agricoles particulièrement riches » ; et que « le patrimoine rural laisse l’opportunité de comprendre ce territoire où règne encore un certain goût pour le secret » ; et que « dans le centre historique [...] l’hôtel Saint-Simon se donne à voir, au promeneur attentif, au fond d’une courette réduite à sa plus simple expression ».

Lisez plutôt Borromini en perspective, ouvrage collectif proposé par le Louvre dans sa collection "D’art en questions". On y trouve la très notable contribution de Paolo Portoghesi, LE spécialiste du baroque romain (et qui avait notamment participé au catalogue de l’exposition Roma Barrocca, dont je parlai brièvement dans la CR XXXVIII), que ça fait plaisir de la lire, même traduit ; un parallèle très intéressant entre Mansart et Borromini, par Jean Castex (architecte et enseignant à l’école d’architecture de Versailles), et une étude sur l’influence dudit Barromini dans l’architecture anglaise, par Sir Howard Colvin (professeur au St John’s College d’Oxford). Les contributions de Giovanni Careri (introduction) et Werner Oechslin, en revanche, me paraissent pour l’une dispensable, pour l’autre obscure.

Pour le plaisir de l’anecdote vous pouvez également donner un oeil à la Vie du Chevalier Francesco Borromini, Architecte de Giovanni-Battista Passeri ; ça se lit vite et ça donne une idée de ce que l’on pensait de Borromini à son époque.

Voilà, un moment critique un peu bref, mais d’autres plus étoffés suivront. Au demeurant, je pondrai probablement pour la rentrée une note beaucoup plus longue sur Philip Glass.

W***

2 Comments:

Blogger Alcib said...

J'ai beaucoup aimé Philip Glass et il m'arrive encore de l'écouter longuement.

La lecture de ce billet me rappelle que je suis passé par Angoulême un jour et que je l'avais oublié. Il ne me revient de cette ville aucune image en mémoire. Je note les suggestions de lecture. Merci.

1:20 pm  
Blogger Walter W. Malldwight said...

Cher Alcib, je commente le concert de Philip Glass à Lyon dimanche dernier sur mon autre blog (http://waltermalldwight.hautetfort.com). Vous trouverez également, dans l'album "Mai", d'Angoulême quelques photos de la cathédrale Saint-Pierre.

Bien à vous.

4:19 pm  

Post a Comment

<< Home